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Lynx MD 87 : le coupé sport que Dacia faillit produire

 



La MD 87 ne ressemble à aucun véhicule produit en Roumanie et attire immanquablement les regards..


La MD 87 est un véhicule séduisant qui sera à deux doigts de devenir un modèle de série.


Croquis réalisés par Nicolae Cosmescu lors de l'élaboration du projet MD 87.

La Dacia Lynx MD 87 fut l'une des voitures les plus spectaculaires jamais créées en Roumanie, C'était un joli petit coupé sportif à moteur central et roues arrière motrices, développé en 1987 pour les courses de rallyes. Elle eut hélas l'infortune d'être abandonnée juste avant la mise en production. Parmi les individus qui présidèrent à sa naissance, Nicolae Cosmescu, un ingénieur de Pitesti.

Le design spectaculaire de la Dacia MD 87 devait beaucoup à la vision de Cosmescu : « Quand j'ai découvert le monde des voiture de sport, j'ai été subjugué comme bon nombre de gens par les lignes de plusieurs voitures devenues mythiques, telles la Ford Mustang, et surtout la Ford GT40, plus raffinée. Je voulais trouver une forme, mais aussi une formule constructive, séduisante, qui touche directement à l'âme ». Cosmescu voulait réaliser un vrai véhicule sportif à moteur arrière central, une nouvelle tendance qui se développait à l'époque, mais une telle machine de rêve s'apparentait à de la science-fiction dans ce régime où l'on ne discutait même pas la façon dont les voitures étaient construites.

Malgré tous ces obsctacles, Nicolae Cosmescu voulait vivre son rêve. Il rejoignit au début des années 80 la Société d'Assistance Technique et de Service Automobile (IATSA), où, après avoir réalisé plusieurs prototypes et s'être impliqué dans le développement de voitures de sport de production, il saisit l'occasion de faire autre chose. Lui et quelques collègues décidèrent de procéder à l'étude d'un modèle moderne basé sur une idée qui avait germé dans son esprit: une carrosserie totalement nouvelle et très basse, environ 1,07 mètres de haut.

« J'ai présenté un certain nombre d'études de style à la direction et aux autres ingénieurs, mais aucune décision ne fut prise dans un premier temps. Il s'agissait vraiment d'une idée audacieuse dans le contexte de l'époque. J'avais à l'esprit une vision très claire de ce à quoi le projet devrait ressembler, mais je me suis assez vite rendu compte qu'il coûterait trop cher à développer, se souvient Nicolae Cosmescu. En 1985, il apparut évident qu'on ne pourrait atteindre nos objectifs et réaliser facilement un prototype qu'en partant du châssis d'une Dacia Sport. À force de travail, de sueur et d'initiative, j'ai pu réaliser un projet de carrosserie pouvant accueillir deux occupants (pilote et mécanicien). J'ai pu ensuite déterminer l'empattement, à savoir la distance entre les axes longitudinaux des deux ponts, car c'est de là que tout découle ensuite. »

L'ingénieur coucha sur papier les plans du futur modèle et les présenta à ses supérieurs pour validation. Il était un peu nerveux parce que ses dessins représentaient un défi à des modèles populaires plus classiques. Pourtant son modèle futuriste séduisit : « Avec une ardeur sans limites, et en peu de temps, j'ai réalisé un dessin échelle à l'échelle 1:5, extrêmement précis et rigoureux, une véritable coupe longitudinale du futur modèle. Nous avons fourni tous les détails techniques nécessaires à la commission technique et économique, qui à cette époque était seule en mesure de valider de tels projets. À cette époque-là, le classicisme automobile, représenté par la Dacia 1300, était la règle d'or ; or ce projet dépassait tout ce que les décideurs étaient en mesure de concevoir. Cependant, mon expérience reçut le feu vert, parce qu'ils étaient curieux de voir si l'on pouvait concilier les deux visions », explique avec fierté l'ingénieur de Pitesti.

Immédiatement, il se mit au travail avec d'autres passionnés d'automobile. Malgré l'aspect spectaculaire du projet, les travaux suivirent une logique simple, presque banale. "Prendre une partie d'une carrosserie d'une Dacia Sport, une partie d'un autre véhicule, et après quelques opérations chirurgicales de rigueur, déplacer les éléments mécaniques... c'est tout ! » Un longeron en bois et en métal fut installé pour raccorder les parties avant et arrière. Le moteur se retrouva à la place de la roue de secours, et la boîte de vitesse prit la place du réservoir d'essence. Seul le radiateur demeura en position frontale. En seulement un trimestre entre les mains de ces artisans créatifs et enthousiastes, le projet est devenu réalité. « La fascination de construire un tel modèle avait saisi tous les acteurs du projet. J'ai eu deux grands chaudronniers, un mécanicien et un électricien. Trois mois après le lancement, le travail était terminé ! Un record.

Le prototype aurait même été prêt plus tôt si je n'avais pas fait refaire une partie du travail, à cause de la teinte de rouge qui avait été utilisée. Je voulais un vrai rouge, ajoute Nicolae Cosmescu. Et comme le modèle devait avoir un nom, il le baptisa du code alphanumérique « MD 87 ». Les initiales M et D venaient de Monica et Dragoş, les prénoms de sa femme et de son fils. Le numéro représentait l'année de production, une année où Cosmecu espérait pouvoir participer à quelques compétitions, notamment en rallye.

Grâce au travail acharné de toute l'équipe, le prototype MD 87 répondait à toutes les attentes de son créateur : une voiture incroyable à tous égards. Et ce n'était pas seulement une question d'apparence. « Elle marchait parfaitement. J'étais amoureux de sa conduite. » Il faut bien reconnaître qu'un tel projet n'avait jamais été entrepris par personne auparavant chez Dacia. « C'était un rêve devenu réalité, et cette liberté de création a été l'occasion d'expériences formidables, une source de joie intense et intime », se souvient Nicolae Cosmescu.

Cosmescu avait de grands projets pour sa MD 87. Tout d'abord, il voulut qu'elle participe au Championnat National des Rallyes. Grâce à son système de freinage à disques, la voiture était équilibrée et endurante, et sa conduite un plaisir. Même sur des terrains à faible adhérence, elle se montrait remarquablement maniable, même si cela requérait un pilote d'une grande maîtrise qui sache gérer les imprévus quand le véhicule perdait le contrôle. Le frein à main hydraulique était installé dans une configuration technique tout à fait unique. La boîte de vitesses comportait un levier qui descendait vers l'arrière plus bas que le plancher, protégé par un carénage. La MD 87 était quasiment une voiture de course ; il ne lui aurait manqué qu'un bloc moteur plus puissant.

Vue de l'avant, la voiture trahissait encore un peu ses origines, mais l'arrière était complètement nouveau et différent de ce qui existait sur le marché en Roumanie à ce moment-là. « Non seulement elle possédait un style propre qui ne passait pas inaperçu, mais sa livrée rouge était tout à fait unique dans le paysage automobile monotone de l'époque et invoquait une grande puissance de séduction. Cosmescu se souvient d'un enfant encore petit dans une poussette, visiblement étonné, qui montrait du doigt la MD 87 à sa mère. « Bien que très petit, il avait immédiatement réalisé combien l'événement était inhabituel, même pour lui. »

L'ingénieur eut un autre moment de satisfaction intérieure, un peu plus tard, alors qu'il supervisait la préparation de sa voiture à son premier championnat de rallye dans la région du Banat. Il n'est pas peu fier de raconter cette anecdote : « Nous allions livrer la voiture à notre pilote numéro un, Ionel Malaut, qui travaillait à Pantelimon. Je suis allé là-bas pour superviser les préparatifs et fus témoin de faits amusants. Alors que la machine était montée sur un camion, dans toute sa gloire, le pilote, qui avait travaillé à l'étranger, impressionné de ce qu'il voyait, s'écria : « Ça, c'est le genre de choses qu'on ne fabrique plus en Roumanie! ». « Eh bien si, pourtant elle est roumaine ! » répondit fièrement Cosmescu à Malaut.

Bien que, techniquement, tout fonctionnait parfaitement et sans incident mécanique, le projet ne dépassa jamais le stade de prototype. Ce n'était ni pour des raisons de conception, ni de coût ou d'autres problèmes techniques. « Si le projet s'été limité à un prototype et n'a pas été produit, même pas en petite série, c'est purement à cause du facteur humain ! Au sein de l'IATSA, j'étais coordonnateur de l'équipe de conception de la MD 87, mais j'avais à mon tour un supérieur direct, lequel dirigeait l'ensemble de l'atelier de conception, qui était assez grand. Il avait au départ d'excellentes relations avec l'équipe que je dirigeais, jusqu'à ce qu'elle décide de se séparer de lui. Alors, puisque j'étais son subordonné hiérarchique, j'étais dans une position délicate. J'ai donc préféré mettre un terme au développement de prototypes et abandonné la transition vers la série », explique Nicolae Cosmescu.

Environ deux ans après l'arrêt du développement du programme MD 87, Cosmescu se livra à une première évolution de la MD 87 baptisée "Evo 1". « Le projet comprenait un restyling quasi-total du véhicule. Les relations avec Dacia à cette époque, vers 1992-93, étaient difficiles. J'étais alors la tête d'un atelier de production et de service de l'IATSA, et c'est grâce à cette position que je pus obtenir un financement pour cette intervention esthétique. Tout l'arrière de la "Evo 1" fut redessiné, incorporant un hayon entièrement en fibre de verre qui réduisait le poids du véhicule pour de meilleures performances et un grand spoiler placé haut à l'arrière.

La dernière version de la MD 87, baptisée "Evo 2", consista à enlever la calandre inutile et à remplacer le grand spoiler par un modèle plus discret. « La disparition du compartiment moteur m'a permis de redessiner le capot en le rendant plus plongeant. Il en résultat une meilleure voiture, avec une carrosserie qui intégrait désormais les pare-chocs, » se souvient Nicolae Cosmescu. Il en résulta une élégance agressive qui évoquait de meilleures performances. Sous cette dernière forme, la MD 87 attirait le regard grâce ses deux phares escamotables, sans doute inspirés par ceux de la Toyota MR2. Hélas, la compétition suivante sonna également le glas du prototype. La MD 87 était excellente sur asphalte, mais n'était pas adaptée aux chemins de terre et aux terrains un peu rocailleux. Le pilote de la MD 87 préféra se retirer de la course, et Cosmescu décida alors de mettre fin au programme.

Sources : divers sites web ; texte essentiellement adapté d'un article roumain d'Adevărul paru sur le site Click!


Sur cette photo de la MD 87 fraîchement peinte, on remarque le nom "Lynx" au-dessus du feu arrière gauche, un nom jamais repris ensuite.

On remarque ici un embryon de spoiler.

L'héritage de la partie avant d'une 1310 est évident dans cette photo de la MD 87 prise du dessus.

La MD 87, toutes ouvertures béantes.

Nicolae Cosmescu pose devant la MD 87.


La MD 87 "Evo 1", avec son hayon vitré en fibre de verre, plus léger, et son grand spoiler.


La MD 87 "Evo 2", très inspirée de la Toyota MR2 avec ses phares escamotables.