Renault Concepts
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La Matra P23 devient la Renault Espace

 

Prototypes P23 de 1982

Prototypes P23 de 1983

Philippe Guédon, PDG de Matra, s'est vu refuser son projet de monospace par Peugeot (projet P18) puis Citroën (projet P20). Il joue donc son va-tout pour sauver son entreprise. Après quelques modifications supplémentaires, Matra tente le jackpot en frappant à la porte de chez Renault avec son prototype P23, développé en octobre 1982 sur base de R18. Le P23 représente une évolution importante du design, d’une part parce qu'Antoine Volanis a quitté Matra, et d’autre part, parce que la base que Matra utilise est désormais celle de la Renault 18, une traction avant à moteur longitudinal (la Solara et la BX ont un moteur transversal). L’empattement est réduit à 2,55m, le museau est rallongé. Le P23 emprunte son train avant à la Fuego (elle-même dérivée de la R18).

Le P23 est présenté au PDG, au directeur technique et au directeur du produit de la régie par Philippe Guédon en décembre 1982. Bernard Hanon, PDG de Renault est immédiatement séduit. Lui aussi connaît les Etats-Unis et l’engouement qu’y connaissent les vans aménagés. Il aurait même déclaré : « C’est la voiture à laquelle on aboutira naturellement lorsque l’on aura dépassé toutes les vanités automobiles.» Cette fois-là sera la bonne pour Matra. Renault s'engage sur le projet, assurant ainsi du même coup la survie de Matra.

Le premier essai commun Matra-Renault a lieu en mars 1983, en région parisienne et de nuit, pour ne pas attirer l’attention. Renault apporte sa pierre à l’édifice, en ajoutant à la P23 un moteur de 2 litres de cylindrée et surtout des sièges amovibles, une véritable révolution dans la perception de l’univers automobile que l’on doit à Jacques Cheinisse, l’actuel directeur « produit » du constructeur. L’étude d’une version utilitaire lui donne en effet l’idée de valoriser le plancher plat en utilisant des sièges démontables. Auparavant toutes les autres études avaient une banquette classique. Ainsi apparaît donc la caractéristique la plus révolutionnaire de cette automobile. Les formes sont également assouplies, et les prototypes d’avril 1983 arborent les formes quasi définitives.

La mise au point doit s’accélérer pour un lancement au printemps 1984. En juin 1983, Renault et Matra signent un accord de coopération prévoyant « l’étude et la fabrication par Matra, à partir d’organes mécaniques Renault, de véhicules commercialisés par le réseau européen de Renault ». La Matra P23 devient la Renault J11, dénommé Espace, et en janvier 1984, les modèles de présérie sortent des chaînes Matra à Romorantin. Les modèles de série sont quant à eux fabriqués à partir de mars 1984.

La P23 sera vendue à 191674 exemplaires, en plusieurs versions. Deux grandes séries peuvent être distinguées : la Matra P23 et la Matra P23 bis. La première possède des fanons à l'avant et une poignée de coffre au dessus de la plaque, tandis que la deuxième possède une calandre plate et une poignée de coffre en bas. Les ventes de P23 passeront de 18173 en 1984 à 46257 en 1990, sa production passant de 23 par jour à plus de 210, en comptant l’usine Alpine de Dieppe en complément à partir de juin 1987. Son règne en Europe et surtout en France sera sans partage, les vraie rivales n'apparaissant en France que vers 1989. Philippe Guédon, le "père" de l'Espace, dira ceci : "L'Espace est une réponse à une question qui n'était pas posée."

La gamme Espace restera inchangée jusqu’en 1991. Une suspension arrière pneumatique à correcteur d’assiette sera proposée en option sur les versions haut de gamme en avril 1990. La dernière P23 sort des chaînes Matra en janvier 1991. La carrière du P36, son successeur, peut alors commencer. Au final, plus d'un million de Renault Espace, toutes versions confondues, seront vendues (dont plus 874000 par Matra), constituant le plus gros succès commercial d'un modèle développé par Matra.

Stéphane BEAUMORT

Sources : divers sites web

Prototype P23 de 1983

Le J11 Espace définitif